Snorri Sturluson et la Vôluspâ font état d’un affrontement mémorable entre Ases et Vanes, qui se serait conclu par un échange d’otages (Kvasir [Njördr dans une autre version] de la part des Vanes, Hoenir et Mimir pour les Ases) et par la paix. Selon la Vôluspâ, une magicienne, Gullveig (« Ivresse d’Or », nom qui pourrait alors renvoyer à la cupidité), serait la cause de cette guerre.
S’agit-il d’un affrontement entre deux peuplades différentes, au Ir millénaire avant J.-C., d’un conflit entre deux couches de la même société, ou encore d’une rixe rituelle, attestée dans d’autres cultures, destinée à cimenter l’unité d’une civilisation donnée ? Ce mythe, fort peu documenté, a beaucoup intrigué les chercheurs. Une interprétation historique veut que les Indo-Européens (Ases ?) aient affronté les autochtones (Vanes ?) pour imposer leur loi - sans succès -, d’où le modus vivendi adopté : on peut en effet discerner dans la religion et la mythologie nordiques anciennes deux strates qui remonteraient à deux cultures différentes. Selon G. Dumézil et d’autres auteurs, cette guerre serait un symbole de l’opposition entre la caste des guerriers et la classe des paysans adeptes de la magie, et la paix conclue la condition sine qua non à la mise en vlace d’une société structurée. Les batailles pour la domination de l’Irlande - les Fir Bolg et les Fomoiré
En établissant leur souveraineté sur l’Irlande, les Tûatha Dé Dânann durent combattre deux redoutables groupes de créatures, qui jouèrent chacun un rôle décisif dans la formation de l’« histoire » de l’île. Les derniers envahisseurs, ceux qui avaient délogé les Thûata Dé, étaient les Fir Bolg, peuple préceltique mythique qui devait sans doute son nom au dieu Builg. Les Thûata Dé vainquirent les Fir Bolg lors de la première bataille de Mag Tured et les obligèrent à s’exiler dans les îles d’Aran, où ils auraient construit le fort massif de Dun Aonghusa on Inishmore. Une tradition veut que les Tûatha Dé aient autorisé les Fir Bolg à conserver la province de Connaught. C’est à Mag Tured que Nûada perdit son bras.
Le second groupe que les Tûatha Dé Dânann durent affronter étaient les Fomoiré (les démons d’en dessous), race démoniaque qui résidait en permanence en Irlande, auxquels Partholon s’était déjà heurté en envahissant l’île et qu’il avait combattus dans la première bataille d’Irlande. Quand les Tûatha Dé occupèrent le pays, les Fomoiré entreprirent de les harceler sans trêve, pillant leur territoire et les accablant d’impôts, infligeant des châtiments terrifiants à ceux qui refusaient de s’exécuter. Les Fomoiré avaient à leur tête un chef redoutable, Balor (A l’oeil torve), doté d’un oeil unique et énorme qui tuait instantanément celui qui le regardait fixement et qu’aucune arme ne pouvait abattre. Balor habitait sur l’île de Tory, où il vivait dans la crainte permanente de voir s’accomplir une prophétie selon laquelle il mourrait de la main de son petit-fils. Malgré ses efforts pour retarder cette fin en tenant sa fille, Ethne, à l’écart des hommes, celle-ci devint grosse et donna naissance à des triplés. Balor les jeta à la mer, mais l’un d’eux survécut : c’était Lug, lui-même à demi Fomoiré, qui conduisit finalement les Tûatha Dé à la bataille contre les Fomoiré et tua lui-même Balor d’un jet de fronde dans l’oeil.
Comme les Tûatha Dé, les Fomoiré sont une race divine. Balor incarne les forces négatives du mal, dont le pouvoir ne peut être tenu en échec que par la forcelumière de Lug, lui-même parent de Balor. Les Tûatha Dé et les Fomoiré sont peut-être l’archétype du dualisme entre les forces de la lumière et les forces chthoniennes (c’est-à-dire liées à la terre ou au monde souterrain), source de conflit mais aussi de dépendance réciproque. Cette dimension est attestée par l’ascendance de Lug et par les pratiques agricoles des Fomoiré, indispensables au bien-être des Tûatha Dé nanann.